Les cas de l'abbé Pierre et de Gérard Depardieu

 



 

I

 

Les révélations récentes, troublantes, touchant les exactions de nature sexuelle de Henri Grouès alias abbé Pierre jettent l’émoi, non seulement dans tout l’Église catholique, ébranlent même les non-croyants. Cette icône de l’Église du Christ œuvrant toute sa vie pour les plus démunis, appelant à une « insurrection de bonté » dans une société florissante de l’après-guerre, prend une dimension plus que grotesque. Évidemment, il faut espérer qu’une large enquête systématique fasse la lumière sur ce triste personnage, monstre au double sens du terme : monstre sacré, pressenti de son vivant comme un saint ; monstre ténébreux, diabolique, aussi, oppresseur de pauvres femmes affligées par les difficultés du mal-logement dont le même monstre luttait pour améliorer le sort.

Comme bien d’autres dans l’Église, je reste abasourdi, dévasté, sans mots pour qualifier ces conduites innommables, inqualifiables. Un profond état d’incompréhension m’envahi, me subjugue. Évidemment, seule la prière me permet de rester à flots. Toutefois, même si la prière est notre seule bouée de sauvetage, il faudra tôt ou tard, une fois la peine retombée à un niveau tolérable, réfléchir sur le sens de toute cette triste affaire.

Comment ce prêtre voué toute sa vie au message évangélique du Christ a pu ainsi berner tout le monde, à commencer par ses pauvres victimes ? Les ténèbres justement veillent à demeurer opaques et nous jettent dans une profonde perplexité. On dirait presque que l’Esprit du Mal, l’Adversaire, l’Ennemi, etc., s’en va rigolant tout jouissif de son sombre forfait.

On est alors conduit à concevoir un être maléfique, totalement opposé à Dieu, le Summum Bonum, le Bien Suprême. Et l’on est alors conduit avec raison à demander au Summum Bonum d’annihiler le Maléfique. On aboutit alors au détestable manichéisme du Bien (Dieu) opposé contre le Mal (le Satan). Ce n’est pas la position de l’Église, celle-ci privilégiant la doctrine de la privatio boni remontant à Tertulien (160-240 après J.C.) revue et corrigée par Saint Augustin (354-430 après J.C.). La privatio boni énonce que le bien seul existe et que le mal n’est qu’une absence (privatio) du bien. Évidemment, la question se pose de savoir pourquoi existe-t-il des êtres ou des choses privés de bien ? Prenons l’exemple biblique du serpent dans le récit de la Chute. Pourquoi un être (un animal, le serpent tentateur) est-il privé de bien, alors que Dieu juge que tout ce qu’il créa était très bon ? (Genèse 1,31).

Pourquoi les choses sont ainsi et pas autrement ?, demandait le philosophe allemand Leibniz ? Question par excellence de la métaphysique.

Pourquoi ne pas penser que le mal existe en bonne et due forme à côté du bien ? Pourquoi ne peut concevoir que le bien et le mal ne sont que des opposés qu’il s’agit de surmonter, de réconcilier, de réunifier ? C’est le point de vue du fondateur de la psychologie analytique du suisse Carl Gustav Jung (1875-1961). À la base, l’être humain est un être divisé, fondamentalement par le conscient, d’une part, et l’inconscient, d’autre part. Le conscient pense en termes de division, de séparation, d’unilatéralité. Pas l’inconscient.

Le champion moderne du conscient fut le philosophe français René Descartes (1596-1650). On se souvient de son célèbre cogito : « Je pense, donc je suis. » C’est-à-dire : j’existe dans la mesure mon petit moi pense. Même lorsque je rêve à des choses étranges, farfelues, c’est bien moi qui rêve. Là-dessus personne ne peut me contredire. Ce que l’histoire ne dit pas, c’est tout ce que Descartes dit du moi conscient est tiré de saint Augustin. Dans La Cité de Dieu, au livre XI, Augustin écrit :

Si je me trompe, je suis. Qui n’est pas, en effet, ne peut se tromper… Donc, en tant que je me connais que je suis, je ne me trompe point… Et quand j’aime cet être (moi), et cette connaissance, j’ajoute un troisième élément, mon amour, dont je suis également certain.

Le moi conscient pose ici son être. Évidemment, le moi conscient est heureux de cet état de chose, de sorte qu’il s’aime. En fait, la tradition parlera de Raison. Le moi conscient devient donc la source de la Raison et, donc, de l’amour.

Pour reprendre la question de tantôt de Leibniz, pourquoi est-ce ainsi et pas autrement ? C’est-à-dire : pourquoi je suis et que j’aime être ? La réponse de saint Augustin coule de source : parce que Dieu, qui m’aime, l’a voulu ainsi.

Évidemment, la question qui vient immédiatement à chacun, c’est : d’où Augustin tire-t-il l’existence de Dieu ? Non pas de son moi conscient, mais de sa foi en Dieu. Croire en…, en effet, à la différence de croire que…, ne relève pas de la conscience à proprement parler, mais de la foi qui est une disposition à faire confiance. Je fais par exemple confiance à mes parents. D’où aie-je bien pu tirer cette confiance, si ce n’est d’une sorte d’instinct non-conscient ?

Dans la psychologie analytique de Jung, le croire en… - la foi - ne provient pas du conscient, mais de l’inconscient. Plus précisément, du Soi (das Selbst). En somme, de l’Être profond que je suis, mais qui reste en bonne partie inconscient. De sorte que, pour Jung, Dieu, c’est le Soi. Si saint Augustin ouvrit la théologie à l’homme intérieur - l’anthropothéologie – au moi conscient -, ce qui constitue une révolution remarquable à l’intérieur du christianisme, Jung, pour sa part, ouvre l’anthropologie à la psychologie des profondeurs, plus précisément à l’inconscient. Or, dans l’inconscient, on distingue l’inconscient supérieur – le Soi – de l’inconscient inférieur, ou infraconscient.[1] Il existe une sorte d’osmose, un échange continuel, entre le conscient et l’inconscient. Malheureusement, la modernité a radicalement disjoint le conscient de l’inconscient, jetant aux orties le second, faisant du premier le roi et maître de toute la psyché humaine. Dans l’infraconscient, nous retrouvons les figures psychiques archétypales qu’habillent nos blessures personnelles dans notre inconscient personnel résultant de notre propre histoire personnelle remontant principalement à la petite enfance. Ces figures infraconscientes prennent l’allure du diable et des démons.

Lorsque Jésus fut tenté au désert par le diable (Mathieu 4), on a tendance à croire en une entité réelle, objective, existant indépendamment de Jésus, Fils de Dieu. D’où, le manichéisme sous-jacent. En psychologie analytique, toutefois, il s’agirait plutôt d’un personnage infraconscient manifestant une volonté de puissance comme opposée à la toute-puissance de Dieu (du Soi). C’est sans doute le fameux serpent d’Éden se manifestant à Adam et Ève afin de les fourvoyer. On pourrait dire qu’il s’agit en fait de l’Ombre de Dieu. Si Dieu est lumière, il faut une Ombre. Or, une ombre ce n’est pas rien et ce n’est pas moins que rien. On dira ce qu’on voudra, mais sans ombre, il n’y a pas de lumière - et réciproquement.

Dans la psyché – toujours selon la psychologie analytique de Jung - l’infraconscient constitue l’ombre de l’inconscient supérieur, lumière dans la psyché. Jésus Christ constitue en fait la victoire de la Lumière sur l’Ombre, le moi conscient parvenu à la parfaite conscience de Soi. C’est-à-dire que le moi conscient du Christ est devenu Soi.[2]

On comprend dès lors que la tâche du moi conscient de l’homme consiste à équilibrer, pour dire le moins, ses rapports avec l’inconscient (supérieur et inférieur). Jung soutient que lorsque le moi conscient surmonte pour ainsi l’opposition du bien et du mal survient un symbole, une sorte de synthèse qui réconcilie, qui unifie. La croix est de cet ordre. De signe funeste, sinistre, calamiteux, en tant qu’objet de torture chez les Romains des vils criminels, la croix du Christ devient symbole lumineux, « numineux », annonçant la résurrection.


 

II

 

Cela étant posé, examinons les cas de l’abbé Pierre et de Gérard Depardieu. Dans les deux cas, il paraît assez clairement que tous les deux ne sont pas parvenus à réaliser leur Soi. Dans les deux cas, c’est la figure infraconsciente de la volonté de puissance qui s’est imposée prenant le contrôle de la psyché.

Le cas de l’abbé Pierre alias Henri Grouès est particulièrement affligeant et désolant car ce dernier prétendit consacrer sa vie au Christ qui représente, comme on l’a vu, le modèle par excellence du Soi. Tout se passe comme si le « diabolos » - le personnage ténébreux de l’infraconscient du moine capucin -, lui montrant la puissante gloire du royaume des mondes, demanda de se prosterner devant lui, ce que fit Henri Grouès. Évidemment, tout ceci reste hypothétique, présumé, incertain, même si de notre vivant nous n’en saurons peut-être jamais rien. Je fais mien le mot de Spinoza : « Ne pas railler, ne pas pleurer, ne pas haïr, mais comprendre. »

Le cas de Gérard Depardieu, tout aussi affligeant et désolant, permet une meilleure prise parce que l’acteur français s’est un jour passionné pour les Confessions de Saint Augustin. Comment ne pas voir là un aveu implicite de ses turpitudes sexuelles puisque l’auteur des Confessions (des Aveux) fut pendant longtemps, comme il le dit dans ses propres mots « un amant de l’amour », ce qu’aujourd’hui on comprend comme un « amant de la fornication » (plus vulgairement, du sexe ou de la baise). Ce qui est remarquable, c’est qu’Augustin ait tout reconsidéré cette époque de sa vie comme un prélude à sa vie religieuse. Il part de lui-même pour trouver Dieu. C’est nouveau, voire révolutionnaire. Comme on l’a vu précédemment, il part de ses expériences passionnelles conscientes.

Je suis d’avis que Gérard Depardieu s’est reconnu dans les aveux de celui qui deviendra évêque d’Hippone. Ce n’est donc pas tant la sublime langue littéraire de l’auteur des Confessions qui mais le parcours sans compromis du grand dépendant sexuel que fut Augustin.

Dans Lire Saint Augustin, Depardieu a choisi de lire publiquement certains passages des Confessions qui l’ont le plus touchés. Pour sa part, un spécialiste d’Augustin, André Mandouze, commente et situe les textes lus par Depardieu.

Le deuxième et le troisième de ces textes sont hautement révélateur de l’intérêt que Depardieu porta à Augustin. Il y a d’abord celui d’un passage tiré du Livre III (1,1) où l’auteur raconte son séjour à Carthage, lieu de débauche du futur saint. Dans ces pages, l’auteur excelle au plan littéraire à enrober les excès sexuels de ce jeune qui n’a pas encore vingt ans.

J’arrivais à Carthage [vers 370], et dans un grand tapage, partout autour de moi flambaient en ce creuset de honteuses amours. Je n’aimais pas encore, mais j’aimais à aimer et, si j’en éprouvais d’aventure un moins grand besoin, un besoin plus secret me faisait alors me détester moi-même…

 

Arrêtons-nous ici sur ce début du deuxième texte choisi par l’acteur français. Augustin nous dit qu’il « aimait aimer » (amare amabam). Traduisons : Augustin aimait le sexe, à telle enseigne que s’il pouvait en éprouver parfois du déplaisir, il se détestait. La séduction, la convoitise, la jouissance, voilà ce qu’Augustin « aimait aimer ». Est-ce que cela justifiait la conduite de Depardieu ? Il est loisible de le croire.

Voyons maintenant le prochain texte choisit par l’acteur français. Tiré lui aussi du Livre III (chapitre 2) des Confessions.

Le théâtre me ravissait avec ses spectacles pleins des images de mes misères et des aliments plein du feu dont je brûlais.

 

Que doit-on entendre précisément par ces « images de mes misères et des aliments plein du feu dont je brulais » ? Encore une fois, ces aveux se terrent derrière un paravent esthétique, littéraire. Les « misères » d’Augustin émergent, bien évidemment, de ses aventures « amoureuses » (sexuelles). Poursuivons.

Mais comment se fait-il qu’ici l’homme veuille souffrir au spectacle d’événements affligeants et tragiques dont pourtant il ne voudrait pas avoir lui-même à pâtir ? Et pourtant il veut pâtir des souffrances en spectateur, et la souffrance même fait son plaisir. Qu’est-ce là sinon un misérable écart de la raison ? Car chacun est, en la circonstance, d’autant plus remué que moins raisonnablement guéri de pareilles dispositions.

Le théâtre – la tragédie – nous plongerait donc dans la souffrance, et nous nous en délectons. Songeons au pauvre Œdipe chez Sophocle. Nous assistons à une lente descente aux enfers. Augustin, si l’on l’en croit, y prit un macabre plaisir. Pas Aristote. Car, pour ce dernier, la souffrance en elle-même n’a aucune valeur. Elle n’en a que lorsque m’identifiant au pauvre Œdipe, il me fait descendre dans mes propres enfers. Aristote appelait cela la « catharsis » (la purgation). De sorte que la souffrance peut devenir belle, grande, riche d’enseignements permettant de grandir.

Je crains bien toutefois que Depardieu ait prit au pied de la lettre l’« amour » d’Augustin pour le théâtre à savoir comme sensation délectable de la souffrance pour elle-même, ce qu’on a l’habitude de désigner par « masochiste », le plaisir dans la douleur. Le terme « masochisme », rappelons-le, fut forgé par le psychiatre autrichien Richard von Krafft-Ebing, dérivé du nom de l’écrivain allemand Leopold von Sacher-Masoch (1836-1895), pour décrire des perversions sexuelles. Sacher-Masoch mit en scène – entre autres dans son célèbre roman La Vénus à la fourrure (1870) – des femmes superbes dominatrices et cruelles. Bien avant Sacher-Masoch, Augustin louangeait les drames « masochistes ». S’il avait lu La Vénus à la fourrure, il ne serait sans doute jamais devenu prêtre.

Quoi qu’il en soit, il est à parier que Depardieu souscrit à la thèse augustinienne touchant le théâtre comme délectation de la souffrance ou masochisme.

À cette période carthaginoise, Augustin se conforte et se consume dans l’infraconscient. Évidemment, il n’en resta pas. Vers 384, il fit la rencontre de l’évêque de Milan, Ambroise. Sous l’influence de saint Ambroise, Augustin n’embrassa certes pas la foi chrétienne, mais bouge pour ainsi dire en direction de l’infraconscient vers l’inconscient supérieur (ou plutôt, l’inconscient supérieur le ramena vers lui, le détournant des ténèbres de l’infraconscient). Deux ans plus tard, Augustin, devenu professeur de rhétorique, découvre la philosophie néoplatonicienne de Plotin (205-270 après J.C.).

En gros, le néoplatonicisme de Plotin enseigne que l’univers constitue une hiérarchie, tout en haut trônant le Bien, l’Être ou l’Un, l’Unique, puis, en bas, en se dégradant, il y a l’Intellect et, enfin, dans les bas-fonds, l’âme humaine. Cette dernière est constituée par la sensibilité, la sensation. En somme, le moi conscient d’Augustin prend conscience qu’il est au niveau inférieur de l’être, voire du non-être, et qu’il existe des régions supérieures auxquelles il aspire maintenant. D’où la quête spirituelle qu’il entame.

À cet égard, il faut mentionner l’amitié qu’il noue avec Alypius, qui restera son fidèle ami, sans oublier, bien entendu, sa mère Monique. Comme on sait, la conversion d’Augustin eut lieu en août 386, dans un jardin en compagnie de son fidèle ami. Au bord de la crise, Augustin entend une voix enfantine lui dire : « Prends et lis ! » Augustin lut alors ce passage de la Lettre aux Romains 13,13) de saint Paul:

Gardez-vous de festoyer et de boire. Gardez-vous des coucheries et des débauches. Gardez-vous des querelles et des jalousies. Revêtez-vous de notre Seigneur Jésus-Christ et ne vous faites pas pourvoyeurs de la chair dans ses convoitises.

 

Comme dirait Jung, ne s’agit-il pas ici clairement d’un phénomène de synchronicité ? Comment, en effet, ce passage sur lequel tombe le futur saint porte précisément sur la lourde lubricité d’Augustin faisant obstacle à sa conversion ?

Nous souhaiterions, par ailleurs, savoir comment, de son côté, a réagi Depardieu en lisant ce même passage des Confessions (Livre VIII 12,29). D’ailleurs, au préalable, Depardieu a-t-il à la suite d’Augustin entamé le même revirement qu’opéra le saint vers 384 ? Revirement consistant, comme on l’a vu, à reconnaître le non-être de l’âme sensible engluée dans la sphère de la sensibilité (de l’infraconscient), désirant impérativement, après coup, accéder aux régions supérieures, celles du Bien et de l’Un qui sont celles du Soi ? En somme : a-t-on affaire en Depardieu uniquement un esthète qui se pâme pour la plume de l’évêque d’Hippone ?

 

Certes, le simple fait de prendre plaisir à lire publiquement les Confessions témoigne d’une certaine remise en question intérieure. L’adage ne dit-il pas : Qui s’y frotte, s’y pique. Espérons-le.

Qu’en est-il de ce célèbre passage du Livre X (27,38), cité aux pages 49-50 :

Bien tard, je t’ai aimée,

Ô beauté si ancienne et si nouvelle,

Bien tard, je t’ai aimée !

Et voici que tu étais au-dedans, et moi au-dehors.

Et c’est au-dehors que je te cherchais,

Et sur la grâce de ces choses que tu as faites,

Pauvre disgrâcié, je me ruais !

Tu étais avec moi et je n’étais pas avec toi.

 

Pas un mot de la part du pauvre lecteur qui ne se contente que de lire. En tout cas, comme je le signalais, le simple fait de lire ce chef-d’œuvre constitue un appel ou rappel du Soi au petit moi borné.

 

III

 

Du point de vue de la psychologie analytique de Jung, ce qu’il y a de remarquable, pour ne pas dire de sublime, dans le célèbre passage précédent des Confessions, c’est le point de vue adopté par celui qui parle. Qui, en fait, parle dans ce texte essentiel ? Trois possibilités se présentent : le moi conscient, le Soi inconscient, ou encore le moi conscient du Soi faisant advenir une part du Soi inconscient. C’est cette troisième possibilité qui parle. Le Soi, par définition, n’est que Totalité. Or, cette Totalité demeure inachevée et inachevable. Nous conclurons sur cette citation de Jung :

Il n’y a pas lieu… de nourrir l’espoir d’atteindre jamais à une conscience approximative du Soi ; car, quelques considérables et étendus que soient les secteurs, les paysages de nous-même dont nous puissions prendre conscience, il n’en subsistera pas d’inconscience qui, elle aussi, fait partie intégrante de la totalité du Soi.[3]

C’est qu’avait compris pour sa part Ben Sira le Sage lorsqu’il écrit :

Quand l’homme en a fini, c’est alors qu’il commence,

Et lorsqu’il s’arrête, sa perplexité demeure.[4]

 



[1] Cette distinction n’est pas de Jung, mais du psychologue italien Roberto Assagioli (1888-1971). Voyez Le développement transpersonnel, Desclée de Brouwer, 1994. La psychologie d’Assagioli est dite « transpersonnelle » car elle se veut être au-delà du petit moi qui se trouve dirigé par le Soi. À propos de l’infraconscient ou inconscient inférieur, Assagioli écrit dans Psychosynthèse (Épi, 1983, p. 26-27) : « En font partie, ou en prennent naissance : 1. Les activités psychiques élémentaires mais remarquables, qui dirigent la vie organique ; la coordination intelligente des fonctions physiologiques. 2. Les tendances et les pulsions primitives. 3. Plusieurs ‘complexes psychiques’, à forte tonalité émotionnelle, les résultats du passé proche et lointain, individuel, héréditaire et atavique. 4. Les rêves et les activités de l’imagination d’un genre élémentaire et inférieur. 5. Différentes manifestations pathologiques (phobies), obsessions, délires paranoïdes). 6. Certains processus parapsychologiques incontrôlés. »

[2] D’ailleurs, Jung considère que le Christ est un modèle du Soi, sans doute le modèle par excellence. Aussi se pose la question lancinante sur laquelle Jung a toujours refuse de répondre de manière tranchée, c’est-à-dire métaphysique (sur ce qui est) : le Soi est-il le symbole du Christ ou le Christ est-il un symbole du Soi ? (voir Aïon, Études sur la phénoménologie du Soi, Paris, Albin Michel, p. 106, 2021.)

[3] C.G. Jung, Dialectique du Moi et de l’inconscient, Paris, Gallimard, Éditions folio, 1964, p. 112-123.

[4] Siracide 18,7.

Commentaires

Messages les plus consultés de ce blogue

Dessine-moi l'évolution !

LE RETOUR DE MISTER CHANCE

L'UTILITARISME DE TRUMP